Affaires européennes, environnement

Le gaz et le nucléaire obtiennent un label vert sous condition

Tribune de Genève – 06/07/22 – L’atome et le gaz pourront être étiquetés «vert» et obtenir des financements plus favorables. Mais les ONG promettent de s’y opposer devant les tribunaux.

L’issue du vote était incertaine, ce qui n’est généralement pas coutumier du Parlement européen, mais les eurodéputés viennent de marquer un tournant important dans la saga « taxonomie » de l’UE. Ils ont soutenu l’acte délégué de la Commission européenne qui propose d’inclure le gaz et le nucléaire comme « activité de transition », en vue de la neutralité climatique d’ici 2050. Conséquence directe : les projets de centrales à gaz et nucléaires pourront bénéficier d’un label « vert » sous certaines conditions. 

Le résultat du vote a été applaudi à droite de l’hémicycle, avant d’être hué par des militants présents dans la galerie des visiteurs à Strasbourg. En jeu, le choix des investisseurs quant il s’agira de financer des projets énergétiques. Un label vert sur le gaz et sur le nucléaire les incitera davantage à soutenir ce type de projets. La taxonomie se divise en trois catégories : les activités durables, habilitantes, ou de transition. Le gaz et le nucléaire tombent dans cette dernière, d’après la Commission européenne. Une qualification inacceptable pour plusieurs États de l’Union comme le Luxembourg ou encore l’Autriche et une partie du Parlement.

Au Parlement européen, 78 voix ont manqué sur 639 votants pour rejeter l’acte délégué. Au sein des trois principaux groupes, le PPE à droite, les libéraux de Renew Europe, et les socialistes du S&D, aucune consigne de vote n’a pu être donnée en raison des divergences internes. Le résultat du vote est une défaite amère pour la coalition d’élus contre l’acte délégué. D’autant plus que celui-ci avait été rejeté par deux commissions parlementaires ces dernières semaines. « Ce manque de vision met à mal la crédibilité et la durabilité de la taxonomie comme boussole à long terme pour les investisseurs », a réagi l’eurodéputé luxembourgeois Christophe Hansen, issu du parti de droite PPE. Il fait partie des quelques élus de son groupe à s’être prononcés contre l’acte délégué.

La France en cause

Certains de ses collègues dénoncent une décision orchestrée par une poignée d’États membres à qui elle profite, avec Paris pour chef de file. « Les critères de qualification ont été écrits par la France, pour la France », estime le député vert néerlandais Bas Eickhout.

Seules les centrales nucléaires ayant obtenu un permis de construire avant 2045, et disposant d’un plan d’installation d’ici 2050 pour éliminer les déchets hautement radioactifs entrent dans la taxonomie européenne. Trois États membres seulement remplissent ces critères, d’après Christophe Hansen.

La France est le pays européen le plus dépendant de l’énergie nucléaire et elle prévoit de construire d’autres réacteurs dans les prochaines années. Environ la moitié des États de l’Union ont recours à cette source d’énergie, mais ils sont nombreux à opérer une trajectoire de sortie. 

Dans ce contexte, la transition écologique ne peut se faire sans le gaz et le nucléaire, estiment les défenseurs de l’acte délégué. « Le vrai sujet, c’est la sortie du charbon qui pollue énormément plus que le nucléaire », glisse le député français François-Xavier Bellamy (PPE, droite). De plus, les conditions posées par la taxonomie pour le gaz sont précises, pour le français Pascal Canfin, issu de la majorité présidentielle. « Le gaz est possible uniquement pour remplacer du charbon, jusqu’en 2030, sous des seuils d’émissions qui ne sont pas considérés comme dangereux et avec des obligations de transparence renforcées », a-t-il précisé quelques minutes après le vote.

Voix dissonantes d’Ukraine

À l’image des groupes politiques et des États membres de l’Union, différents sons de cloche sont parvenus d’Ukraine à propos de l’acte délégué. Le ministre de l’énergie ukrainien German Galushchenko a appelé à ne pas rejeter la proposition. Le gaz et le nucléaire ont un grand rôle à jouer dans l’indépendance énergétique de l’Europe face à la Russie, selon lui. La production nucléaire ukrainienne pourrait notamment y contribuer.

De l’autre côté, la député ukrainienne Inna Sovsun (parti centriste « Voix ») a appelé le Parlement européen à rejeter l’acte délégué, à la veille du vote : « Le gaz inclus dans la taxonomie viendra clairement des gazoducs déjà construits, et nous savons que la majorité du gaz transitant par les gazoducs vient de Russie. […] j’estime que le gaz russe ne peut pas faire partie de la solution au problème que l’UE tente de résoudre avec la taxonomie ». 

Si l’issue du vote ouvre la voie à l’entrée en vigueur de l’acte, le Luxembourg et l’Autriche ont annoncé vouloir attaquer la décision de la Commission devant la Cour de justice de l’UE. C’est aussi le cas de L’ONG Greenpeace, qui se dit confiante sur le fait que les tribunaux invalideront la décision.

Article à lire sur La Tribune de Genève, et 24heures.

Affaires européennes, environnement

Le rapporteur au PE Mohammed Chahim souhaite un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières plus ambitieux que celui proposé par la Commission

06/01/2022 – Agence Europe – Le rapporteur au PE Mohammed Chahim (S&D, néerlandais) a soumis son projet de rapport sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF ou CBAM en anglais) aux rapporteurs fictifs, mercredi 5 janvier. Il plaide pour un mécanisme plus ambitieux que la proposition de la Commission européenne (EUROPE B12762A5), avec notamment un élargissement des secteurs couverts, une date d’entrée en vigueur avancée et une sortie plus rapide des allocations gratuites de quotas ETS. 

Champ d’application 

Le rapporteur souhaite tout d’abord élargir les secteurs couverts par le CBAM aux composés organiques, à l’hydrogène ainsi qu’aux polymères (classe de matériaux composée de macromolécules). Ils viendraient s’ajouter aux secteurs du ciment, de l’électricité, de l’acier et du fer, de l’aluminium et des engrais. 

La Commission avait décidé de ne pas inclure les composés organiques en raison de « limites techniques » empêchant de déterminer les émissions intégrées des biens importés. Selon Mohammed Chahim, en revanche, « ces produits ont les caractéristiques pour être couverts par le CBAM et les complexités techniques peuvent être surmontées ». 

Par ailleurs, il demande, dans son rapport, que les émissions dites intégrées des produits comprennent les émissions indirectes issues de l’électricité consommée pour la production des biens, le chauffage ou le refroidissement.

Fin des quotas gratuits 

Sujet épineux du texte, les allocations gratuites de quotas aux entreprises européennes dans le cadre du système d’échange de quotas d’émissions (ETS) doivent être supprimées plus rapidement que prévu, selon le rapporteur. Il propose d’appliquer un « facteur CBAM » qui réduira ces allocations progressivement jusqu’à 2028 (90% des quotas maintenus en 2025, 70% en 2026, 40% en 2027, puis 0% en 2028). La Commission européenne avait travaillé sur une sortie progressive en 10 ans, jusqu’à 2036.

Le secteur du ciment ne devrait même plus bénéficier du tout de quotas gratuits à partir de 2025, selon le rapporteur. « Le ciment est le secteur qui a la moins forte intensité commerciale parmi les biens couverts par le CBAM. Le risque de fuite de carbone est faible et une entrée en vigueur plus rapide est justifiée », écrit-il. 

Entrée en vigueur

Sur ce point aussi, le rapporteur plaide pour un calendrier d’application du règlement plus bref. Il souhaite avancer la pleine application du règlement à 2025 au lieu de 2026, ce qui laisserait deux années de transition – au lieu de trois à partir de 2023 -, durant lesquelles les entreprises devront seulement déclarer leurs importations. 

Fonctionnement 

Au lieu d’autorités compétentes dans chaque État membre pour gérer les certificats CBAM, Mohammed Chahim demande qu’une autorité centrale soit mise en place par la Commission européenne. 

Cette « autorité CBAM » serait chargée de contrôler les autorisations d’importations et l’achat des certificats CBAM. Elle serait en mesure de prendre toutes sortes de décisions pour mettre en œuvre le règlement. 

Le rapport introduit également la possibilité pour les entreprises de faire appel d’une décision de cette autorité. 

Il durcit par ailleurs les règles concernant les amendes pour non-conformité. La Commission européenne avait étudié plusieurs scénarios et s’était arrêtée sur deux niveaux d’amende. Les fraudeurs devaient payer une pénalité équivalente à 100% du prix d’un certificat ou 200% de son prix pour chaque certificat non acheté. Le rapport de M. Chahim durcit le ton en proposant un seul type d’amende, équivalente à 3 fois le prix du certificat CBAM.

Ressources

Comme dans la proposition de la Commission, les revenus issus du CBAM devraient toujours couvrir les coûts de fonctionnement de l’autorité CBAM et ensuite alimenter le budget de l’UE, d’après le rapporteur.

Il ajoute toutefois un amendement précisant qu’« un soutien financier devra être fourni pour soutenir les efforts des pays les moins développés pour la décarbonation de leur industrie », cela à travers les différents programmes existants. « Le soutien financier supplémentaire devra être au moins équivalent à la valeur financière des revenus générés par la vente de certificats CBAM », est-il précisé.

D’autre part, 50% des revenus engendrés par la sortie plus rapide des quotas gratuits devront soutenir l’innovation dans l’UE, selon le rapporteur. Le reste alimentera le budget de l’Union. 

Le rapport n’apporte pas d’indications concernant l’exemption des pays les moins développés au CBAM. 

Dans les prochains mois, la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI) du PE devra adopter sa position en vue d’un vote en plénière autour du mois de juin. 

Voir le projet de rapport : https://bit.ly/3eQ31zU  (Léa Marchal)

A lire sur Agence Europe.

Affaires européennes, environnement

La Commission européenne dévoile son plan pour un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE à partir de 2026


Dans sa course vers la neutralité climatique d’ici 2050 et au milieu d’un paquet de 13 mesures, la Commission européenne a présenté, mercredi 14 juillet, son plan pour un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF). 

« Ce mécanisme sera introduit d’une manière prudente et progressive et il sera totalement compatible avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Nous prendrons en compte le prix du carbone payé dans les pays tiers et l’efficacité des émissions produites par les producteurs, afin que le mécanisme soit équilibré et non discriminatoire », a déclaré le commissaire européen au Commerce, Valdis Dombrovskis. 

Comme nous l’avions écrit (EUROPE B12733A9B12756A16), la Commission prévoit un mécanisme calqué sur le système d’échange de quotas d’émission (ETS) s’adressant aux importateurs de l’UE. Les importations d’électricité, de fer et d’acier, d’aluminium et d’engrais sont pour l’instant sujettes au mécanisme dans la mesure où elles représentent 55% des émissions à risque pour les fuites de carbone, selon la Commission. Celle-ci se réserve la possibilité d’étendre le système à d’autres secteurs, sans toutefois préciser de calendrier. 

Les entreprises concernées devront restituer des certificats d’émission (ou certificats MACF) en fonction de l’intensité carbone des produits importés. Le prix des certificats s’alignera sur celui des quotas ETS. Afin de rendre ce suivi possible, les entreprises devront déclarer leurs importations auprès d’une autorité nationale compétente. 

La Commission n’imagine pas une mise en œuvre complète du mécanisme avant 2026. Du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2025, les importateurs devront déclarer les émissions contenues dans leurs produits ainsi que le prix du carbone déjà payé ou non à l’étranger. Ils ne devront toutefois pas restituer de certificats d’émission pendant ces trois années de transition. 

Quotas gratuits et MACF

Afin d’éviter une double protection des entreprises européennes face aux fuites de carbone, la Commission confirme qu’elle prévoit de réduire le nombre de certificats d’émission à restituer pour les importateurs dont les secteurs bénéficient de quotas gratuits sur le marché intérieur dans le cadre de l’ETS. 

Ces quotas gratuits devraient toutefois être progressivement supprimés. « Les quotas gratuits seront réduits de 10% chaque année, sur une période de 10 ans », a expliqué une source européenne à EUROPE.

Accueil de la proposition

La plupart des réactions autour de la proposition se concentrent sur cette fin progressive des quotas gratuits avec l’entrée en vigueur du MACF. 

Cette réduction « risque de déstabiliser fortement les investissements pour les secteurs concernés », a mis en garde le président de BusinessEurope, Pierre Gattaz, représentant les fédérations d’entreprises européennes.

Même son de cloche du côté de l’eurodéputée Agnès Evren (PPE, française). « Ce mécanisme ne doit pas mettre à mal la compétitivité de nos entreprises en mettant automatiquement fin aux quotas gratuits. […] nous devons obtenir la garantie que les instruments nécessaires à notre compétitivité industrielle ne soient supprimés que si ce mécanisme fait la preuve d’être une alternative fiable et viable », a-t-elle indiqué. 

Pour d’autres, en revanche, la fin des quotas gratuits devrait être bien plus rapide que ce que prévoit la Commission. L’eurodéputé Pascal Canfin (Renew Europe, français) considère que la période de 10 ans à partir de 2026 pour la suppression définitive des quotas gratuits est trop longue. « Je pense qu’on doit pouvoir trouver une majorité au Parlement européen pour aller plus vite. Je trouve normal de commencer par une phase de montée en puissance progressive, y compris une phase pilote dès 2023. Néanmoins je suis favorable à ce qu’on aille plus vite qu’une décennie pour que le dispositif tourne à plein », a-t-il expliqué à EUROPE. 

Plusieurs ONG partagent cet avis, comme CAN Europe, ou la fondation Bellona

« 10 ans de transition pour la sortie des quotas gratuits, ça signifie 14 ans par rapport à aujourd’hui. C’est bien trop long », a confié Suzana Carp de la fondation Bellona à EUROPE. Pour elle, cette période pourrait prendre fin en 2030, plutôt qu’en 2036. 

Complexité administrative

À l’annonce de ce tout nouveau mécanisme, les PME européennes s’inquiètent également de la lourdeur administrative du système. « Le calcul complexe pour la déclaration des émissions sur les produits importés risque de faire payer un prix carbone plus élevé aux petits importateurs. La Commission européenne doit ainsi assurer que les procédures et conditions sur cela soient simples et gratuites », a déclaré Véronique Willems, secrétaire générale de SME United, représentant les PME européennes.

Voir la proposition de règlement de la Commission : https://bit.ly/3kgPTHS  (Léa Marchal)

environnement

EU TRADE POLICY STRUGGLES TO FIT INTO GREEN DEAL PLANS

The European Union believes that its landmark trade policy can foster sustainable global trade.

“Trade drives development, and it is a powerful lever to influence the world“, said Charles Michel, the president of the European Council, in Berlin on 9 November. But the increase in trade is worrying European public opinion, at a time when the EU is having to drastically reduce carbon emissions.

Multiple effects

Brussels’ “Fit for 55” proposal to reduce the EU’s greenhouse gas emissions by 55 per cent by 2030 compared to 1990 levels will not be enough to limit global warming to 1.5 degrees, according to the latest report from the Intergovernmental Panel on Climate Change.

Against this background, how does the EU’s ambition to remain a major trading power fit in with its Green deal strategy?

Trade’s impact on the environment is manifold, according to a study published in 2004 by the American Economic Association. It can raise greenhouse gas emissions due to a global increase in production and to the movement of production to countries with more carbon-intensive industrial methods. But if production is shifted to countries with cleaner production methods, it can also lead to a decrease in pollution. In addition, trade can reduce emissions by boosting cleaner production modes.

As far as the emissions from international freight transport are concerned, a 2013 study by the Journal of Environmental Economics and Management found that freight transport was responsible for a third of global trade emissions – something that is not always taken into account when assessing the potential impacts of trade agreements (the case, for example, of the impact assessment commissioned by the European Commission for the EU-Mercosur deal).

Read the full article and its second part on Euranet Plus

environnement

CARBON BORDER TAX COULD MISS ITS TARGET

To counter carbon leakage, the EU plans to introduce a carbon border adjustment mechanism that will tax importers of carbon-intensive products.  But it is the bloc’s consumers who could pay the highest price.

“Fit for 55” is the name of the legislative package that the European Commission proposed on 14 July 2021. The 13 pieces of legislation should help the continent reach the objective of reducing greenhouse gas emissions by 55 per cent by 2030 (compared to 1990) and put it on the path to climate neutrality by 2050.

Among these, stands the proposition for a so-called carbon border adjustment mechanism, or CBAM. While carbon-intensive European production has been subject to the EU emissions trading system – or ETS – since 2005, products imported into the EU have not been subject to any carbon price taxation. This means that EU-made products are competing with cheaper imports from abroad, which encourages “carbon leakage” as EU producers relocate abroad to benefit from lower standards and lower costs.

The carbon border levy is intended to fill this gap, by requiring European importers of electricity, cement, steel, aluminium and fertilisers to pay CBAM certificates based on the carbon content of their products.

By introducing this mechanism, the EU hopes to reduce carbon leakage to other parts of the world where no environmental constraints are in place.

Limited scope

However, the mechanism as proposed by the Commission covers only 3.2 per cent of goods imported into Europe. According to a study produced by think tanks Sandbag and E3G, importers will face only minor costs after CBAM comes into force, says Thomas Burns of Sandbag, who co-authored the study.

Read the entire article on Euranet Plus

environnement, social

En Europe de l’Ouest, les apiculteurs craignent pour leur avenir

Devant la boutique de miel Api Douceur à Giromagny en France, un curieux container avec des vitres se trouve à côté de l’allée qu’on emprunte pour rejoindre les ruches. Il s’agit d’un distributeur automatique, installé en 2019 par les propriétaires de l’exploitation apicole. «  Comme on n’était que deux au début, on n’arrivait pas à ouvrir la boutique à des horaires régulières. Donc on a pensé au distributeur pour permettre aux passants, ou même aux randonneurs du dimanche, de pouvoir acheter leur pot de miel », indique Flavien Durant, 31 ans, co-gérant de la société depuis 2017 avec Patrick Giraud. Le distributeur leur permet d’étendre un peu la clientèle et d’essayer de rentabiliser un métier de plus en plus précaire.

Alors qu’en moyenne, Flavien et Patrick produisent 8 tonnes de miel par an, en 2021, ils n’en ont sorti que 300 kilos. Parmi les 400 ruches qu’ils avaient à la sortie de l’hiver, la majorité n’a pas produit de miel. Cette année, la plupart des apiculteurs ont connu le même sort. La récolte de miel en 2021 se situera entre 7.000 et 9.000 tonnes selon l’Union nationale de l’apiculture française (UNAF). En 2020, elle s’élevait à 19.000 tonnes environ.

Lire la suite de l’article sur Equal Times

environnement

Y a-t-il vraiment de la place pour les abeilles dans la politique européenne ?

Les apiculteurs d’Europe sont mis en difficulté par les politiques agricoles. Ces dernières décennies les politiques européennes, et en particulier la Politique agricole commune (PAC) ont promu l’intensification de l’agriculture, affectant sévèrement les abeilles. Pesticides et raréfaction des ressources sont désormais la norme. La prochaine programmation de la PAC n’annonce que peu de progrès. Les apiculteurs sont las des décisions politiques. Des experts et professionnels d’Allemagne, Espagne et France expliquent les causes de ce désarroi.

Article réalisé grâce au soutien du JournalismFund, pour Cafébabel

François Le Dudal est apiculteur depuis une dizaine d’années. Il est installé en Bretagne, dans les Côtes d’Armor avec ses 400 ruches. Il faut parcourir une longue route de campagne avant de le rejoindre. Dans cette zone rurale, ses abeilles ont tout pour avoir la belle vie, pourrait-on croire. Pourtant, en 2018, François a perdu 80% du total de ses abeilles à la sortie de l’hiver. Ses collègues de la région ont aussi rapporté des pertes considérables.

Les professionnels touchés se sont penchés sur les premières causes possibles. Les mauvaises pratiques apicoles, les conditions météo, le varroa (bactérie qui touche les ruches) ont vite été écartés. « Plus ça allait, plus on avait des suspicions sur des problématiques en lien avec la toxicologie. Ce à quoi les abeilles avaient pu être exposées avant l’hivernage, et qui aurait pu avoir comme conséquence un effondrement des colonies d’abeilles », explique François Le Dudal, qui est aussi Président du Syndicat des apiculteurs professionnels bretons (SAPB).

À ce moment, l’Observatoire de la mortalité et de l’affaiblissement des abeilles mellifères (OMAA), créé la même année en Bretagne, conclut à diverses causes, mais ne fait pas de recherche toxicologique sur les abeilles. Dans le cas de François Le Dudal, ses abeilles auraient souffert de la maladie de la nosémose. Pour lui, ça n’explique cependant pas un tel effondrement.

François Le Dudal possède quelque 400 ruches dans les Côtes d’Armor en France. Avec la municipalité d’un village voisin, il a installé un rucher pédagogique au coeur du bourg, où enfants et adultes peuvent observer les abeilles de manière sécurisée © Léa Marchal

Il est difficile d’établir un lien de cause à effet direct entre l’usage d’un pesticide et la mort donnée d’une colonie d’abeilles. D’une part, les experts estiment que les analyses toxicologiques révèlent presque toujours la présence de pesticides, sans que cela soit déterminant. D’autre part, la mortalité des abeilles est dûe à plusieurs facteurs.

Le premier rapport du Conseil mondial de la biodiversité mentionne le changement d’affectation des sols, l’utilisation de pesticides, les espèces envahissantes, les nouveaux agents pathogènes et le changement climatique. Une étude de l’université de Maryland aux États-Unis de 2016 a tout de même mis en évidence que les pesticides avaient un effet nocif sur les colonies. Les auteurs ont également mis en lumière l’effet cocktail de ces produits. Certains pesticides considérés comme non toxiques engendrent une hausse de mortalité dans les colonies, quand ils sont cumulés.

Pour François Dudal et bon nombre d’apiculteurs et apicultrices en Europe, les règles européennes en matière de pesticides sont loin de faire leur travail. Dans son jardin, à quelques pas d’une partie de ses ruches, il exprime sa déception. « On a eu des interdictions, mais à chaque fois, c’est pareil. Entre l’autorisation de mise sur le marché, le constat sur le terrain des problématiques que ça occasionne, la mise en évidence, l’interdiction, il se passe des années. […] Et quand un produit est interdit, ils essaient de retarder l’interdiction en usant de tout. Que ce soient les lobbys à Bruxelles, le ministère de l’Agriculture, en passant par le syndicat FNSEA (syndicat majoritaire pour l’agriculture en France, ndlr) ».

À plusieurs milliers de kilomètres de là, Lütke Schwienhorst s’inquiète des conséquences de tout ça. Il est agriculteur de formation, et travaille à plein temps comme conseiller agricole à la Fondation Aurelia à Berlin. « Les abeilles sont représentatives d’autres pollinisateurs tels que les abeilles sauvages, les bourdons ou les papillons. Ils disparaissent tout simplement, sans que personne ne s’en aperçoive », explique-t-il. Les insectes pollinisateurs sont pourtant nécessaires au fonctionnement de l’agriculture : les scientifiques estiment qu’environ une bouchée sur trois de notre nourriture en dépend. Pendant son temps libre, le trentenaire s’occupe de plusieurs colonies d’abeilles. Lorsqu’il est assis à son bureau, il s’intéresse principalement à la politique agricole de l’UE, et à ce qu’elle signifie pour les insectes.

Le guide pour l’abeille

À Parme en Italie, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) est chargée d’évaluer les risques qui entourent notre alimentation. Elle a également été confrontée au problème de manque de données lors de la révision de son guide pour les abeilles (Bee Guidance, en anglais, ndlr). Il rassemble des recommandations scientifiques pour l’autorisation des pesticides. Sur cette base, l’UE décide des pulvérisations qui peuvent être utilisées dans les champs européens.

L’EFSA a présenté son guide sur les abeilles pour la première fois en 2013, mais les États membres de l’UE se sont abstenus de l’adopter, jugeant les règles trop prudentes et irréalistes. La proposition de l’EFSA d’accepter un taux de mortalité des abeilles de 7% par ruche pour autoriser un pesticide posait problème. Un accord a finalement été trouvé 8 ans plus tard, à la fin du mois de juin 2021 : en dessous de 10 % de pertes causées au sein d’une colonie, le produit peut recevoir le feu vert.

Entre temps, l’Union européenne a serré la vis sur un autre type de pesticides : les néonicotinoïdes. Elle a restreint l’usage de trois substances de cette famille (clothianidine, imidaclopride, thiaméthoxame) en 2013, avant de les interdire totalement en 2018. De quoi réjouir les apiculteurs. Mais à l’heure actuelle, au moins 25 autorisations d’urgence ont été octroyées à travers l’Europe pour utiliser ces produits sur certaines cultures, comme la betterave sucrière. Les États membres ont la possibilité d’accorder des autorisations d’urgence pour une durée maximale de 120 jours « s’il existe un risque qui ne peut être maîtrisé par d’autres mesures », selon la directive européenne qui régit ces mesures d’exception.

Un désert vert en Allemagne © Antolín Avezuela

« Il y a eu une mise en évidence sur les néonicotinoïdes, que c’était dangereux pour les abeilles, pour la biodiversité en général, que ça crée un effondrement pas possible. On a un ensemble d’espèces qui ont disparu à jamais. On ne va pas regagner la biodiversité comme ça », regrette François Le Dudal.

Ceux-ci agissent directement sur le système nerveux des insectes. Ils affaiblissent l’orientation de l’abeille, qui ne retrouve parfois plus le chemin de la ruche. Un résultat comparable à celui de la drogue chez l’être humain, sauf que les abeilles sont souvent victimes d’overdose. On ne sait guère ce que cela signifie pour les autres insectes pollinisateurs, qui sont, dans bien des cas, moins résistants que les abeilles mellifères, et n’ont pas encore été testés.

Ces dérogations fonctionnent également pour d’autres pesticides interdits. Début 2021, l’apiculteur breton s’est rendu compte que le ‘lumiposa’ bénéficiait d’une autorisation temporaire en Bretagne. Ce pesticide, qui sert à lutter contre les mouches géomyze et oscinie sur maïs, est considéré comme à risque élevé pour les abeilles. Si le maïs n’est pas la fleur la plus attirante pour l’abeille, celle-ci en butine parfois. De plus, elle peut être amenée à chercher de l’eau dans les gouttes de guttation sur la plante de maïs au matin, dans lesquelles la concentration des molécules sera encore plus élevée.

Pas si bio que ça

Loin des champs de maïs bretons et des sapins sur lesquels se nourrissent les abeilles de François Le Dudal, les dirigeants européens et eurodéputés décident du futur cadre de la Politique agricole commune (PAC) pour la période 2023-2027. Le 25 juin, les négociateurs du Parlement européen ont trouvé un accord avec le Conseil européen (États membres) sur le texte. Le Parlement doit voter en novembre pour adopter finalement l’accord trouvé, ou non. Les eurodéputés du groupe des Verts/ALE appellent leurs collègues à ne pas approuver le texte. Ils estiment qu’il ne permettra pas d’atteindre les objectifs du Green deal. La mise en œuvre détaillée dans chaque pays s’annonce encore moins ambitieuse.

Pour Tanguy Collet, apiculteur bio dans le département français du Doubs, la PAC qui se dessine n’augure rien de bon pour la filière organique. Le plan national stratégique présenté par la France pour appliquer la PAC 2023-2027 n’est pas à la hauteur des attentes des consommateurs et des professionnels, d’après cet éleveur à la centaine de ruches.

Le ministère de l’Agriculture français propose le même soutien pour le label HVE (Haute valeur environnementale) que pour celui de l’agriculture biologique. Or, le cahier des charges de ce premier est bien moins strict. Si des pratiques environnementales sont encouragées, l’usage des pesticides n’est pas proscrit. Pire, le label HVE ne présente aucun bénéfice environnemental dans la majorité des cas, comme l’a montré le rapport de l’Office français de la biodiversité (OFB), auquel le journal Le Monde a eu accès.

Tanguy Collet est apiculteur bio à Mandeure, en France. Il possède une centaine de ruches © Antolín Avezuela

En sandale dans les hautes herbes qui bordent ses ruches, Tanguy Collet fait par de sa déception quant à ce nouvel horizon. « Ce label ne veut rien dire. Il sert simplement à dire qu’on fait bien, et en même temps on peut mettre des produits sur les cultures ». Le label HVE bénéficie du soutien de la FNSEA, largement représentée dans les négociations avec le gouvernement.

L’apiculteur doubiste estime même que le label bio devrait être encore plus ambitieux qu’il ne l’est actuellement. « Je serais pour que la charte soit très stricte et qu’on ait vraiment un modèle bio d’excellence. Sinon tout le monde peut faire du certifié bio, qui l’est plus ou moins ». Mais de nombreuses forces s’opposent à cette vision, y compris au sein de son métier. Pour certains, il s’agirait d’encourager le plus possible les installations bio, et non pas de dissuader avec un cahier des charges trop strict. Dans son plan national stratégique, la France propose d’augmenter les aides à la conversion au bio (+36%). Elle supprime en revanche les aides au maintien pour les producteurs bio en place.

Tanguy Collet a été « piqué » par les abeilles depuis tout jeune. « Quand vous êtes dedans, c’est un bonheur. Il y a juste le bruissement des ailes, vous travaillez tranquillement, et puis c’est la belle vie quoi », dit-il en souriant © Antolín Avezuela

Un environnement devenu hostile

À côté des substances dangereuses, l’habitat des abeilles est aussi menacé par d’autres facteurs agricoles. Au fil des années, l’agriculture intensive, les monocultures, les fauchages précoces et la bétonisation des sols ont empiété toujours plus sur la biodiversité. Les insectes pollinisateurs se nourrissent de plus en plus difficilement.

La politique actuelle incite à cultiver sur d’immenses surfaces des cultures qui ne fleurissent pas, explique Lütke Schwienhorst. Le blé, l’orge et le maïs prédominent dans de nombreux endroits. Les structures agricoles sont de plus en plus grandes. En Allemagne, par exemple, la taille moyenne des exploitations était de 63 hectares en 2020, soit 13 % de plus qu’il y a dix ans. La situation est similaire dans la plupart des autres pays européens. L’une des raisons est que la majorité des subventions agricoles de l’UE sont fondées sur la superficie : les exploitations reçoivent de l’argent par hectare.

« Tout cela signifie que les zones rurales en Europe se transforment de plus en plus en déserts verts », déclare Lütke Schwienhorst, qui possède lui-même quelques ruches, disposées en plein Berlin. « Et des pesticides sont utilisés sur ces champs où poussent des plantes à fleurs, […] Cela va si loin que les abeilles des villes se portent souvent mieux que celles de la campagne ». Il fait un signe de tête en direction de ses boîtes rouges. Ici, à Berlin, elles sont exposés à moins de pesticides que leurs homologues de la campagne et trouvent plus de plantes à fleurs et d’arbres en ville que dans de nombreux paysages agricoles.

Lütke Schwienhorst, au laboratoire de la fondation Aurelia à Berlin © Antolín Avezuela

Pour tenter d’y remédier, l’Union européenne avait inclus des objectifs environnementaux dans sa programmation de la CAP 2014-2020. Les agriculteurs bénéficient de « paiements verts » à condition de diversifier leurs cultures, maintenir des prairies permanentes, et réserver des surfaces d’intérêt écologiques (SIE). Les États membres ont du consacrer 30% de l’ensemble des aides directes de la PAC aux paiements verts.

Mais selon un rapport de la Cour des Comptes européenne, ce programme n’a pas atteint son objectif d’amélioration des performances environnementales de la PAC. Loin de là. Les exigences relatives aux prairies permanentes par exemple, « n’ont entraîné un changement dans les pratiques agricoles que sur 1,5% des terres agricoles de l’UE », selon les auditeurs. Ces prairies offrent pourtant un couvert végétal bénéfique pour les pollinisateurs.

« Les exigences du verdissement sont généralement modestes et correspondent, dans une grande mesure, à la pratique agricole normale »

La première cause de cet échec résulte, d’après la Cour des comptes, des conditions trop larges pour la réception des fonds. « Les exigences du verdissement sont généralement modestes et correspondent, dans une grande mesure, à la pratique agricole normale », détaillent-ils. Le rapport dénonce également les nombreuses possibilités d’exemptions pour certains critères. Ainsi, 65% des agriculteurs ont pu bénéficier du paiement vert sans avoir d’obligations à respecter au titre du verdissement.

« Ce qui fait défaut, c’est la conservation des habitats naturels et semi-naturels, plutôt que des habitats productifs. Il faut créer autour de ces zones une matrice adéquate pour soutenir ces populations d’organismes sauvages, qu’il s’agisse des lisières ou des terres non cultivées existantes », explique Elena Concepción, chercheuse post-doctorat sur la biodiversité au Musée national de sciences naturelles de Madrid.

La PAC 2023-2027 prévoit à nouveau une sorte de paiement vert, renommé « éco-régimes ». Selon l’accord trouvé, les États membres devront allouer au moins 25% des aides au revenu à ces éco-régimes. Jusqu’en 2024 toutefois, ils pourront se contenter de 20%. C’est trop peu pour une partie des eurodéputés qui militait pour un seuil minimum de 30%.

La nouvelle PAC devrait aussi continuer à protéger l’environnement à travers son second pilier qui se concentre sur le développement rural (FEADER). Au moins 35% du budget de celui-ci devrait être consacré à des engagements agro environnementaux qui favorisent les pratiques en matière d’environnement, de climat et de bien-être animal. Dans l’ancienne programmation 2014-2020, ce seuil était déjà de 30%.

Pour François Le Dudal, il est clair que « la PAC n’est pas du tout en faveur de l’agro-écologie, de la paysannerie ». Il est rejoint par bon nombre d’ONG, syndicats et experts à travers le continent. « Ils repeignent la PAC en vert, mais en réalité, elle provoque toujours une intensification de l’agriculture », affirme Elena Concepción.

Le 20 octobre, le Parlement européen a approuvé un rapport d’initiative réclamant à la Commission européenne (qui est à l’initiative des directives et règlements européens) de présenter une nouvelle proposition de loi sur les pesticides d’ici mi-2022. Ils réclament une réduction de 50% de ceux-ci d’ici à 2030, et un objectif d’un quart des terres cultivées en bio. À nouveau, le résultat de la cuisine interinstitutionnelle à Bruxelles pourrait décevoir les partisanes et partisans d’une agriculture plus verte.

environnement

Incendies en Europe : il n’y a pas de sommet sans feu

Article publié dans Mr Mondialisation, le 25 août 2018, voir original

 

Cette année, l’Europe a vu 40% de forêt brûlées en plus par rapport à toutes les années précédentes. La vague de chaleur et les drames humains ayant même touchés des zones habituellement épargnées, les Européens réalisent les conséquences néfastes du réchauffement de la planète que plus personne aujourd’hui ne réfute. Pourtant, les signaux d’alarme tirés par les scientifiques depuis plusieurs années, voient des réponses faibles, voire inexistantes dans certains pays. Les efforts de quelques uns paraissent dérisoires face à l’urgence climatique.

Voir suite de l’article

environnement

Enjeux climatiques, comment réanimer le désir d’agir

cof
Hugo Metz, Kaï Littmann et Loïc Blaise, aux 12èmes Rendez-Vous Européens de Strasbourg

Article publié sur Eurojournalist, le 24/11/2017. Voir article original ici.

7 jours de 7h30 à minuit. Depuis lundi soir, les « Rendez-vous européens de Strasbourg » multiplient les rencontres. Objectif : embarquer élus, experts, citoyens vers l’Europe de demain, les défis à relever d’ici 10, 15 à 20 ans pour que l’Europe ait encore une voix à faire entendre dans le monde. Et surtout, pour cela, être, depuis Strasbourg, force de propositions. Mardi après-midi, sur le plateau installé en salle des mariages de l’Hôtel de Ville, Loïc Blaise, chef de la mission Polar Kid, et Hugo Metz, producteur à If not us then who. Un moment de partage et d’alerte, vrai, sans filtre, très concret sur l’ampleur du défi climatique à relever.

Mon premier échange avec Loïc Blaise se déroule sur le plateau de Radio En Construction ce mardi matin. Ses réponses sont plutôt courtes et sa voix basse. Pour ma première interview en direct à la radio, je ne suis pas rassurée. La peur sans doute de dire une bêtise, face à un homme atteint d’une maladie incurable, et qui pourtant a fait le chemin pour venir jusqu’à nous. Petit à petit, je réalise qu’il n’est pas venu pour faire une interview avec des phrases à rallonge, mêlant théories scientifiques et politique. Il est là pour rappeler  qu’il faut agir, maintenant», sans plus attendre. Il est l’heure des choix.

«Pour la première fois: un même ennemi commun» : Le dérèglement climatique. – A 16h, à l’hôtel de ville, Loïc Blaise intervient cette fois-ci accompagné de Mya, son husky, qui sera également à bord de l’hydravion lors de la prochaine expédition Polar Kid. Sur l’estrade, il partage la vedette avec Hugo Metz. Ce dernier produit des films documentaires sur les peuples autochtones qui tentent de défendre leurs forêts ou leurs terres. La conférence démarre sur les images de militants en Amérique du Sud, en Afrique, ne vivant que pour défendre une nature qui leur est parfois volée, pour être exploitée. Des images qui suscitent des grands questionnements chez moi. Et je me demande si ce genre de clips peut produire cet effet sur n’importe quelle personne, ou si ça nécessite d’être soucieux des thématiques sociales et environnementales. Dans la salle, le public est très hétérogène. A côté de moi, un couple soixantenaire, derrière moi  un groupe de jeunes étudiantes.  Les personnes qui apparaissent dans le film ont un point commun avec nos deux intervenants : la lutte. Qu’elle soit contre l’exploitation industrielle des ressources naturelles, contre le réchauffement de la planète, ou contre la sclérose en plaques. Toujours sur un ton calme et reposant, Loïc Blaise rappelle que  pour une fois, « tous les habitants de la Terre partagent un ennemi commun: Le dérèglement climatique« . Ce qui nous amène à la conclusion que nous pourrions tous unir nos forces dans ce combat. Et ça commence par l’éducation. « Il faut réanimer le moteur du désir chez les enfants, le désir de sauver la planète, car c’est là que tout commence.  Ce serait donc à nous de prendre les commandes, en changeant nos habitudes de consommation,  à l’image de ce pilote, qui a décidé de surmonter les obstacles et de se battre.

«L’ébauche d’un nouveau modèle, vertueux» – Les récits de ces deux intervenants se complètent si bien qu’ils arrivent inexorablement aux mêmes conclusions. Quand le producteur évoque avec déception les cantines scolaires et la viande servie à chaque repas, l’explorateur abonde en vantant les bienfaits de son nouveau régime alimentaire, réduit en viandes. Quand l’un parle de l’extraction d’huile de palme et de ses conséquences graves, l’autre appuie en citant les produits à éviter. Selon Hugo Metz,  « plus il y a un échange d’idées, plus on questionne ces problématiques, plus on change de comportement, plus on va comprendre qu’on est à l’ébauche d’un nouveau modèle, vertueux, qui fonctionne bien ».

A travers ces petites histoires et ces points de vue, ils se présentent tous deux comme les ambassadeurs d’un mode de vie plus respectueux de soi-même, mais aussi de la nature, qui permettrait de préserver un tant soit peu, notre planète. A en juger par le grand nombre de spectateurs et les applaudissements, Il semblerait que les conséquences deviennent plus concrètes, lorsque la personne qui parle de la fonte des glaces ou de la déforestation nous dit  « j’ai vu », ou  « j’ai perdu« . Les témoignages parfois maladroits, timides, impressionnants, drôles, mais émouvants, apparaissent comme une solution pour faire prendre conscience des dangers immédiats qui étaient jusqu’alors, invisibles à nos yeux.